Une pluralité d’évènements d’origine traumatique existe en milieu du travail, agression, accident, incendie…lorsqu’un événement à potentiel traumatique survient, ses répercussions vont bien au-delà des individus directement exposés. Que faire dans ces situations ? L’organisation dans son ensemble peut être affectée, avec des conséquences sur la dynamique collective, la motivation et la performance des équipes. Dans ce contexte, le manager de proximité occupe une position stratégique car c’est le premier interlocuteur des collaborateurs.
Cependant, accompagner une équipe confrontée à un événement traumatique peut s’avérer délicat. Entre écoute active, reconnaissance des souffrances et maintien des repères professionnels, le manager doit réussir à tempérer la situation tout en ayant les bons réflexes. Il lui est alors essentiel de suivre le protocole adéquate afin de faire intervenir les professionnels adaptés pour prévenir les impacts psychologiques et sociaux et ainsi favoriser une reprise progressive du travail dans un climat de sécurité psychologique.
Dès lors, on peut se poser la question :
Comment un manager de proximité est-il en mesure d’accompagner une équipe ayant été confrontée à un évènement à potentiel traumatogène ?
I. L’évènement à potentiel traumatogène dans le milieu du travail
Il arrive que la vie professionnelle soit brutalement bouleversée par un événement inattendu. Un salarié ou une équipe peut être confronté à une situation marquante, laissant des traces bien au-delà du moment lui-même ou encore pouvant faire écho à quelque chose de plus enfouie en lui.
Ce type d’événement peut fragiliser l’équilibre psychologique des individus et impacter le collectif de travail si aucune prise en charge adaptée n’est mise en place dans l’immédiat.
Un événement à potentiel traumatogène désigne une situation qui confronte un individu à une menace extrême, réelle ou perçue, dépassant ses capacités d’adaptation. Dans ces circonstances, la personne peut ressentir un sentiment d’effroi, d’impuissance ou de choc, pouvant affecter son engagement professionnel et sa santé psychologique.
Différentes formes d’événements à risque :
Dans le cadre du milieu du travail, nous classons ces événements selon plusieurs critères :
- Leur origine : naturelle (catastrophe, incendie) ou humaine (agression, harcèlement).
- Leur nature : accidentelle (chute, explosion) ou intentionnelle (violence, suicide sur le lieu de travail).
- Leur portée : individuelle (concernant un salarié en particulier) ou collective (impactant une équipe entière).
Ces situations de nature différentes peuvent toutes avoir de grandes conséquences : absentéisme, tensions au sein des équipes, baisse de motivation, état de sidération, voire stress post-traumatique.
Toutefois, les réactions varient d’un individu à l’autre selon son histoire personnelle, son environnement de travail, le recul qu’il arrive à prendre face à l’évènement et le soutien dont il bénéficie.
II. Le rôle du manager de proximité face à un événement traumatique : accompagner son équipe, une gestion humaine structuré
Contrairement à un psychologue ou à un professionnel de la santé, le manager de proximité n’a pas pour mission de traiter les conséquences psychologiques de l’événement. Toutefois, il joue un rôle clé dans la gestion organisationnelle de la crise et dans la détection des signaux de mal-être.
Lors d’un événement à potentiel traumatique, comme un suicide ou un accident grave, le manager doit aborder la situation avec prudence et prendre du recul. La communication doit être mesurée, en particulier du déroulement de l’évènement. Il est essentiel de ne pas inciter immédiatement les collaborateurs à parler de ce qu’ils viennent de vivre, car l’état de choc empêche souvent un traitement clair de l’information.
Adopter la bonne posture :
- Il est essentiel dans un premier temps d‘impliquer rapidement des professionnels de la gestion de crise et du soutien psychologique.
- Rassurer et normaliser les réactions : Expliquer que les réactions de panique ou de sidération sont normales face à situation venant d’être vécue.
- Ne pas forcer la parole : Certains collaborateurs peuvent avoir besoin de temps avant de verbaliser leur ressenti.
- Un débriefing technique peut s’avérer utile, en attendant l’intervention des professionnels de santé. Mais il est préférable de laisser les professionnels prendre le relais et mettre en place les outils et les solutions les plus adaptées pour gérer la situation sans le biais émotionnel du manager, parfois trop impliqué.
- Ne pas se laisser emporter par la panique : Maintenir autant que possible des repères clairs pour éviter une sensation de chaos.
- Le manager doit également éviter de prendre des décisions hâtives. Il peut lui-même être impacté par l’événement et doit reconnaître que sa neutralité peut être altérée.
Accompagnement dans l’évènement :
- Accompagnement post-évènement : Lors d’un accident que l’on peut qualifier de grave, ou une présence de décès, un accompagnement avant et après les obsèques est essentiel pour soutenir l’équipe confronté à la brutalité du réel de la mort.
- Faire son deuil : Même en l’absence de décès, un processus de deuil peut être nécessaire afin de permettre une évolution psychologique et émotionnelle de la situation.
- Réactions émotionnelles : Un évènement traumatique peut venir raviver des conflits passés, anciens ou des émotions non résolues. Il est essentiel d’écouter ces réactions et d’assurer un suivi adapté.
- Rassurer et accompagner : La priorité immédiate est de sécuriser et de rassurer les collaborateurs en leur expliquant que leurs réactions sont naturelles face au choc.
- Sidération et temporalité : La sidération est une réaction fréquente face à un choc majeur. Bien que les symptômes puissent être impressionnants, ils sont souvent temporaires et doivent être compris comme une phase du processus d’adaptation.
Points d’attention pour adapter le fonctionnement de l’équipe :
- Ne pas imposer de solutions uniques : Chaque collaborateur réagit différemment et a des besoins spécifiques.
- Prendre en compte les protocoles spécifiques à certains secteurs : Dans des domaines à risques, comme le BTP, des règles précises encadrent la gestion de crise.
- Reconnaître les conflits latents : Un événement traumatique peut raviver des tensions passées. Il faut alors permettre un accompagnement approprié.
Pour bien les gérer, le manager doit être attentif sans imposer une verbalisation immédiate. Il est aussi crucial de mobiliser des professionnels pour un suivi adéquat.
Quant à la communication post-incident, il convient d’éviter de trop en dire trop vite. Un excès d’informations peut gêner la compréhension et créer de l’anxiété supplémentaire. Il est préférable d’adopter une posture discrète et respectueuse des besoins des collaborateurs, tout en mettant en place un soutien adapté et accessible.
Conclusion :
Lorsqu’un évènement à potentiel traumatique survient, le rôle du manager de proximité n’est pas de substituer aux professionnels de santé mentale, mais bien de faire le relais vers des experts de la psychologie du travail sachant prendre ce genre de situation en mains. Présence Conseil, permet ainsi aux entreprises d’avoir un accompagnement complet et personnalisé. La mission première du manager de proximité est de tempérer du mieux qu’il peut la situation, en maintenant un climat de confiance et en orientant rapidement ses collaborateurs vers les ressources adaptées. En adoptant cette posture, il garantit une prise en charge efficace tout en préservant la cohésion et la continuité du travail. L’appui de spécialistes est essentiel pour permettre aux équipes de surmonter l’épreuve et de retrouver un équilibre professionnel et personnel durable. Chez Présence Conseil, nous mettons à votre disposition des outils et des ressources pour soutenir vos managers et vos équipes, afin de transformer une épreuve difficile en une occasion de renforcer la cohésion et la résilience au sein de l’organisation, et ainsi remettre l’humain au milieu du travail.
Par Madeleine FOURNIER et Oumaima BCHITOU
BIBLIOGRAPHIE :
- ANACT (2017). Manager le travail. Livre blanc.
- Brillon, P. (2016). Le stress post-traumatique. Dans Marmion, J. (dir.), Troubles mentaux et psychothérapies. (p. 55 -58). Éditions Sciences Humaines.
- Cegos (2010). Les pratiques managériales en Europe.
- Donaldson‐Feilder, E., Yarker, J., & Lewis, R. (2008). Line management competence: the key to preventing and reducing stress at work. Strategic HR Review.
- Lopez, S. Bornstein, Victimologie clinique, Maloine, 1995
- Josse, É. (2019). Le traumatisme psychique chez l’adulte. (2e éd.). De Boeck Supérieur.
- Journoud, S., & Pezé, S. (2012). La formation des managers à la prévention des risques psychosociaux est-elle sur la bonne voie ? La Revue des Sciences de Gestion, 253(1), 51-59.
- Crocq (2007), « Stress et trauma », in L. Crocq (éd.), Traumatismes psychiques. Prise en charge psychologique des victimes, Issy-les-Moulineaux, Elsevier Masson
- Neuville, P., & Lizion C. (2004). Traumatismes psychologiques en milieu professionnel.
- Présence Conseil. (2002). Présence Conseil – Cabinet de Conseil En Prévention des Risques Professionnels. https://www.presence-conseil.fr/
- Zawieja, P. (2016). Chapitre 1. Généralités sur le traumatisme psychique en contexte professionnel. Dans Zawieja, P. (dir.), Psychotraumatologie du travail. (p. 11 -26).